
les collections du château
Légués en 1971 à la Fondation de France, le Château et ses collections constituent un ensemble d’une grande richesse :
le site est meublé, avec les collections conservées par la famille Bérenger-Sassenage au fil des siècles, quelquefois non sans mal.
Le mobilier
Les pièces conservées et exposées au château de Sassenage vont de l’époque Louis XIII à la période Napoléon III, avec une forte majorité de meubles du 18e siècle.
Ces derniers proviennent des ateliers d’ébénistes parisiens (un secrétaire est attribuable à Oeben, ébéniste de Louis XV), mais également des ateliers de la famille Hache, de prestigieux ébénistes grenoblois.
Après s’être initié au décor à l’italienne (entrelacs, guirlandes florales, etc.) Thomas Hache (1664-1747), fils d’un ébéniste toulousain, s’installe à Grenoble en 1695. Il profite d’une évolution du style Louis XIV vers le style Régence (plus allégé) pour établir sa renommée. Ce spécialiste des marqueteries de bois régionaux devient, dès 1721, ébéniste ordinaire du Duc Louis d’Orléans, Gouverneur du Dauphiné.
Son fils, Pierre Hache, travaille à partir de 1725 dans l’atelier paternel. Grâce à l’estampille « Hache à Grenoble », ses œuvres sont connues. Il utilise également des bois des Alpes pour réaliser ses marqueteries (ce qui constitue la « patte » de la famille) et met au point un procédé permettant de teinter les bois régionaux en vert ou en rouge.
Jean-François (1730-1796), le quatrième de ses 12 enfants, est le plus connu de la famille. Il monte à Paris en 1756 et, après une possible rencontre avec Jean-François Oeben, ébéniste du Roi Louis XV, fait évoluer son style : il introduit dans son travail des pièces de marqueterie « à dés », utilise pour ses décors des cartouches à motifs floraux, etc.
Egalement menuisier, il réalise des meubles divers en bois massif, principalement en noyer. Son frère, Christophe-André, travaille aussi dans les ateliers Hache, en qualité d’ébéniste. L’entreprise familiale est vendue au 19e siècle.
Des liens avec la famille de Sassenage…
Marie-Françoise-Camille de Sassenage (1704-1786) fait partie des clients réguliers de Jean-François Hache. Nous savons que l’ébéniste a réalisé de nombreux meubles pour les demeures de la marquise.
Ainsi, commodes, bidets, chaises percées, fauteuils ou encore tables de jeux apparaissent dans les factures de Mme de Sassenage, dès la fin des années 1770.

Les tableaux
Parmi les oeuvres les plus remarquables du château de Sassenage, la bataille de Kircholm par Pieter Snayer en 1620 est certainement la plus emblématique (classé Monument Historique PM38000798)
De grande dimension (L : 285cm la : 186cm), ce tableau du peintre flamand représente la bataille de Kircholm, le 27 septembre 1605.
Kircholm (Salaspils) est un village proche de Riga en Lettonie. L’armée du Grand-Duché de Lituanie et du Royaume de Pologne, la République des deux Nations, combat celle du Royaume de Suède.
Sous les ordres du grand hetman (chef militaire) Jean Charles Chodkiewicz, l’armée lituano-polonaise défait son adversaire suédois pourtant trois fois plus nombreux et sous les ordres directs de leur souverain Charles IX.
Du fait du rapport des forces, la victoire lituano-polonaise connaît un fort retentissement à travers toute l’Europe du XVIIe siècle.
L’arrivée en France du tableau semble être en lien avec l’abdication du souverain lituano-polonais Jean Casimir II Vasa vers 1668 et son arrivée dans l’hexagone. Il meurt à Nevers en 1672, puis ses biens sont vendus aux enchères en 1673. Lors de cette vente y figure la mention de grandes scènes de batailles.
Son identité n’est toutefois révélé que depuis les années 1960 ! Le tableau a été restauré en Lituanie en 2010 pour une exposition au palais des Beaux-Arts de Lituanie.
Les collections comprennent aussi des œuvres picturales, représentant en majorité des membres de la famille Bérenger-Sassenage, mais aussi des membres de la famille royale, puisque les Bérenger-Sassenage furent à leur service durant de nombreuses années, en témoigne cette oeuvre de Charles Leclercq.
En visitant les lieux, vous pourrez également contempler des toiles d’Ernest Hébert (1817-1891), portraitiste renommé du 1e siècle, et ami de la Marquise Lucie de Bérenger (1829-1894) à qui il apprit la peinture.
On compte également des œuvres de Théodore Cesbron, le « peintre de la fleur » au 19e, ou encore du pastelliste George Callot, son contemporain.

Les photographies anciennes
Au sein des collections du Château de Sassenage se trouve un fonds photographique ancien ; son auteur, Raymond-Ismidon-Marie, marquis de Bérenger (1811-1875).
Cette collection de photographies « primitives » constitue un ensemble de grande valeur. Redécouvertes il y une vingtaine d’années par Hélène Bocard, historienne et spécialiste des photographies anciennes, elles sont considérées comme de véritables œuvres d’art et sont parmi les photographies les plus anciennes au monde. Constituées de portraits, de reproductions de gravure et surtout de paysages, elles témoignent non seulement du mode de vie au milieu du XIXe siècle mais aussi de l’œil artistique d’un ancien député orléaniste devenu photographe amateur après la Révolution de 1848.
Élève de Gustave Le Gray, Raymond-Ismidon-Marie se forme auprès d’un des primitifs de la photographie les plus connus.
Il semble débuter cette formation en 1852 au sein d’un atelier parisien.
Résidant à Paris la majorité du temps, il est fortement attaché au Dauphiné , terre de ses aïeux. Il y possède plusieurs domaines notamment son château à Sassenage, mais aussi des biens à Pont en Royans, Saint-Marcellin, ainsi que dans les Hautes-Alpes (Le Glaizil -Lesdiguières, Tallard).
Ses premières photographies sassenageoises, prises dès 1853, jouant ainsi un rôle important en tant que précurseur dans le département de l’Isère. Il est également auteur de quelques clichés parisiens et normands reconnus.
En tant qu’amateur éclairé, il ne se contente pas uniquement de conserver ses propres épreuves, mais il collectionne aussi celles de ses confrères.
Autre source artistique influente pour Raymond, sa propre épouse Marie-Constance-Lucie, dit Lucie, du Bouexic de Guichen descendante d’une prestigieuse famille bretonne. Elle l’épouse en 1853 , alors âgée de 24 ans et lui sert de modèle pour ses premières expériences photographiques.
Le couple est comme voué à l’art de son temps. Lucie se passionne pour le dessin, la peinture et la musique. L’exemple de cette passion commune se retrouve avec la vue légendée par le marquis Les Portes de Sassenage et son équivalence en peinture attribuée à Lucie.
Sources : Bocard Hélène-L’aristocrate et la chambre noire, Musée Hébert, La Tronche, 2009
Mondenard (de) Anne et Pagneux Marc- Modernisme et modernité. Les photographes du cercle de Gustave Le Gray, Acte Sud, Paris, 2012.
Ferrouillat Antoine – La valorisation du fonds photographique de Raymond-Ismidon-Marie de Bérenger au Château de Sassenage.
Mémoire de Master 2, ss la dir. de mme Schneider Marlen, UGA, 2023-24.
La collection de photographie du Marquis de Bérenger est à retrouver sur le site des archives.

Autres œuvres des collections…
Enfin, le château de Sassenage expose au public des collections d’objets variés : porcelaines françaises, sceaux, flacons, armes anciennes, …datant essentiellement des 18e et 19e siècles.
L’importance des collections du Domaine est une chance: le château de Sassenage présente ainsi un intérieur meublé, et une belle cohérence entre son histoire et les pièces exposées, puisque chaque objet ou presque est lié à un membre de la famille…
Ils prennent soin des collections
L’équipe du château de Sassenage tient à remercier chaleureusement les artisans-restaurateurs qui, par leur travail, participent à la valorisation des collections :
⬩Lionel Chardonnet – Atelier Chardonnet-Eleouet, Ebéniste restaurateur d’art.
⬩Frédéric Durmort – Atelier Osiris – Artisan tapissier d’art.
⬩Philippe Boulet – Atelier Roquette – Doreur.
⬩Vickie Acquaviva – Atelier Acquaviva – Restauration et conservation de tableaux.
⬩Charline Venditelli – Atelier Charline Venditelli – Restauration de tableaux.
⬩Catherine Gamby-Garrigos – Atelier Couleurs d’étoiles – Restauration d’oeuvres d’art.
⬩Catherine Eleouet – Maître Artisan d’art.
⬩Florence Whaap – Restauratrice de tissus.
⬩Bérengère Chaix – Restauratrice de dessins et papiers peints.
crédit photos © Elena Bezhenova – Pavel Rogatov – Anaïs Durmort – Etienne Eymard Duvernay.